
10 mars 2023
La justice genevoise a acquitté jeudi en appel le septuagénaire poursuivi pour le meurtre de son épouse en 2016. Les juges retiennent la thèse de l'accident lors d'un jeu sexuel et le condamnent à 3 ans de prison avec sursis partiel pour homicide par négligence.
Selon la Chambre pénale d'appel et de révision, le tableau lésionnel du couple est compatible avec une asphyxie par suffocation sans agression. Les juges ont notamment relevé la relation harmonieuse entre les époux et ainsi que leurs témoignages d'amour réciproque. Ils estiment aussi que les analyses montrent que le couple a eu un rapport sexuel peu avant la mort de l'épouse.
Ils ont donc acquitté cet homme de l'accusation de meurtre qui avait été retenue en première instance. Le mari, aujourd'hui âgé de 72 ans, avait été reconnu coupable d'avoir tué sa femme en l'étouffant. Il avait été condamné à 13 ans de prison. Les faits s'étaient déroulés en février 2016 dans l'appartement de l'épouse, alors âgée de 66 ans.
Asphyxie érotique
Le prévenu, un homme d'affaires soleurois, avait dans un premier temps affirmé qu'elle était décédée de mort naturelle suite à un malaise. Il avait expliqué l'avoir trouvée sur le sol de la salle de bains et dans la panique il l'avait tirée dans la chambre à coucher et hissée sur le lit.
L'homme avait fourni à la justice une nouvelle explication peu avant son procès en appel. Selon lui, la mort de sa femme résulte d'un jeu sexuel d'asphyxie érotique qui a mal tourné. Il n'avait pas pu en parler "par pudeur et honte". L’accusation, qui avait requis 14 ans de prison, n'a pas réussi à démontrer une thèse alternative à celle avancée par l’accusé, selon la Chambre d'appel. Le meurtre par dol éventuel n'a pas été retenu, mais c'était limite, selon la Cour.
Zones d'ombre
La faute de l'accusé n'en demeure pas moins "très lourde". La pratique sexuelle était acceptée par l'épouse mais "pas jusqu'à en mourir". Selon le président de la Chambre pénale, l'homme a fait preuve d'une "négligence crasse" en violant les règles de prudence. Il aurait dû être attentif à la durée de l'asphyxie et surtout au moment où elle a tenté de reprendre son souffle.
Selon la Chambre pénale, le mari n'a pensé qu'à lui. Un simple geste aurait évité l'issue fatale. Les juges ne lui trouvent aucune circonstance atténuante. Sa coopération a été "exécrable" et "son mensonge pendant sept ans n'avait rien de pieux". L'homme voulait avant tout protéger sa réputation, estime la Cour.
Il demeure encore des zones d'ombre dans cette affaire, a relevé le président de la chambre qui regrette que l'homme n'ait pas tout révélé. Etant donné ces circonstances, les juges ont prononcé la peine maximale en cas d'homicide par négligence, soit trois ans de peine privative de liberté, dont 18 mois ferme et ensuite au bénéfice du sursis partiel. L'homme a déjà fait près d'un an de prison.
Une histoire d'amour
Le Ministère public n'a pas fait de commentaires à l'issue de ce verdict. De son côté la défense a exprimé son immense soulagement. "Il était important que la justice restitue l'amour entre les époux dans ce verdict, ce qui n'avait pas été fait en première instance", a déclaré Yaël Hayat, l'une de ses avocates. "Il s'agissait d'un rendez-vous avec l'amour, pas avec la mort", a-t-elle ajouté.
La mort de la femme n'était d'abord pas considérée comme suspecte. C'est la découverte d'une plume de 4,5 centimètres dans la bronche gauche de la défunte qui a changé la donne. Depuis, cette affaire intrigante a été présentée comme l'affaire dite de la plume.
Sources : ATS/Keystone